Déterminisme génétique de la robe du Cocker Anglais


 

Les éleveurs savent bien quelles robes ils peuvent obtenir chez leurs chiots d’après leur généalogie mais parfois, surprise, un chiot est d’une couleur inattendue, car différente de celles de ses parents et ascendants sur plusieurs générations.
Magique ? Non, génétique !

Petits rappels de génétique!

Quelques notions simplifiées de génétique utiles pour comprendre la suite !

L’information génétique est un genre de "programme" qui contrôle le développement et le fonctionnement d’un individu.
Cette information est contenue dans l’ADN (acide désoxyribonucléique), qui est une très grosse molécule composée d’unités : les nucléotides, qui sont au nombre de 4. L’information génétique réside dans la séquence de la molécule, c'est-à-dire dans la succession des 4 nucléotides différents dans un ordre précis (comme des lettres pour former un mot).
Les gènes sont des portions de l’ADN, et de manière très simplifiée un gène est responsable de l’expression d’un caractère chez l’individu.

A un moment de la vie de la cellule, l’ADN se trouve sous forme condensée : les chromosomes. Les hommes possèdent par exemple 46 chromosomes organisés en 23 paires. Nous possédons en effet deux exemplaires différents de chaque chromosome : l’un qui nous vient de notre père et l’autre qui nous vient de notre mère. Les chromosomes de chaque paire possèdent les mêmes gènes au même endroit appelé locus.

En fait, il existe différentes "versions" des gènes, appelées allèles. Si pour un gène donné on possède les deux mêmes allèles sur les deux chromosomes de la même paire, on est homozygote, sinon on est hétérozygote.

Lorsqu’on possède deux allèles différents, on a donc deux informations différentes. L’expression de l’information qui définit le caractère dépend de la " force " de chaque allèle. Dans le cas de dominance, l’allèle dominant s’exprime aux dépens de l’autre allèle, dit récessif. Un allèle récessif devra donc nécessairement être à l’état homozygote (en double) pour s’exprimer, alors que pour l’allèle dominant l’expression à l’état hétérozygote (un seul exemplaire) sera identique à l’expression à l’état homozygote (deux exemplaires).

On peut cependant avoir des cas de codominance, où les deux versions s’expriment simultanément : chaque allèle a un effet " moyen " (comme dans la peinture où noir et blanc donnent gris).

On distingue le phénotype qui correspond aux caractéristiques de l’individu que l’on voit (ex. pour la couleur : chien noir), du génotype qui est l’ensemble des gènes (ex. chien porteur des allèles noir et marron).

Transmission de l’information génétique :

Lors de la fécondation, les gamètes (spermatozoïde et ovule) sont porteurs de la moitié de l’information génétique de chaque parent : Ils contiennent pour chaque paire de chromosome un seul chromosome, pris aléatoirement parmi les deux parentaux. Ils fusionnent pour créer un embryon.

Prenons par exemple le cas d’une mère qui est AA pour un gène donné. Lors de la formation de ses ovules elle va uniquement pouvoir transmettre l’allèle A. Si le père est Aa pour ce gène, il va fabriquer 50% de spermatozoïdes contenant le chromosome porteur de A et 50% porteurs de a. Les enfants seront alors AA dans 50% des cas et Aa dans 50% des cas. Tous seront du phénotype lié à l’allèle A (allèle dominant).

Les séries alléliques du chien :

La couleur de la robe est sous un déterminisme génétique assez complexe : Elle fait en effet intervenir douze gènes, chacun d’eux présents sous 2 ou plusieurs formes alléliques.

Chaque chien possède donc deux allèles de chaque série allélique : soit deux fois le même dans le cas d’un chien homozygote pour ce gène, soit deux différents dans le cas d’un chien hétérozygote pour ce gène.

Il hérite pour chaque série d’un des deux allèles de chacun de ses parents, et ce de manière aléatoire.

Ces gènes agissent sur deux pigments au niveau des poils: l’Eumélanine (couleurs noir, marron) et la Phaeomélanine (couleur fauve). Ces pigments se retrouvent aussi au niveau de la truffe, des coussinets…

D’une race à l’autre, une même couleur peut être due à des séries alléliques différentes !

Attention : Selon les ouvrages, on trouve différentes notations pour les allèles de ces séries alléliques mais leur effet est le même !!!

De plus, il existe parfois entre allèles récessifs des cas de codominance ou de dominance incomplète qui ne figurent pas dans cette explication très simplifiée.

Les gènes mis en évidence ci-dessous sont ceux qui sont les plus importants pour le cocker. Les autres jouent un rôle mineur pour cette race de chien.

Notation : " >" signifie dominant

  • LOCUS A (agouti)

A s (patron uni) > Ay ou A+ (agouti= fauve charbonné, comme le tervueren > a t (tan points = extrémités feu, taches feu sur le poitrail, au dessus des yeux…)

  • LOCUS B (Brun)

B+ (noir) > b (marron)

  • LOCUS C (dilution chinchilla)

C+ (expression normale des pigments, pas de dilution)>C ch (couleur fauve à sable)>Ca (albinos, rare !)

  • LOCUS D (dilution maltaise)

D+ (pas de dilution > d (dilution, du noir en bleu par ex. chez le dogue allemand…)

  • LOCUS E (extension)

E+ (expression normale des patrons déterminés par le locus A)> e br (bringé) > e (fauve récessif, inhibe l’action du locus A)

  • LOCUS F

FM (face masquée, ex. Boxer)> fm (face non masquée)

  • LOCUS G (grisonnement) : les robes foncées sont envahies par du poil blanc argenté.

(grisonnement avec l’age) > g+ (pas de variation avec le temps)

  • LOCUS M  (merle)

M (merle, par ex. berger australien)> m+ (normal)

  • LOCUS P (pink eyed)

P+ (normal) > p (dilution de la robe et yeux roses, ex. pékinois)

  • LOCUS S (spotting : panachure irrégulière) la dominance est plus ou moins incomplète.

S+ (entièrement coloré) > s i (panachure limitée aux extrémités, collier)> s p (pie)> s w (blanc à taches colorées)

  • LOCUS T (robe tachetée dans les zones blanches des patrons panachés)

T (robe tachetée) > t+ (fond blanc pur)

  • LOCUS R (robe mélangée : mélange de poils colorés et blancs dans les zones blanches des patrons panachés)

R (rouanné ou grisonné)> r+ (fond blanc pur)

Le cas du cocker anglais

Les robes du cocker unicolore dépendent :

  • de couleurs (gènes B et E)

  • de la présence ou l’absence de taches feu (gène A).

  • de l’absence de blanc, qui est due à l’allèle S+.

Les robes du cocker pluricolore reposent sur le même principe.

La seule différence réside dans l’apparition de blanc (série S) et la présence ou non de mouchetures (série T (ou R))

  • Les unicolores :

Trois gènes majeurs sont impliqués : A, B et E.

Robe noire : Le noir est du à l’allèle B+, allèle dominant. Les chiens noirs peuvent donc être B+b ou B+B+.

Robe chocolat : le chocolat est du à l’allèle b qui est un allèle récessif. Le chien chocolat est donc nécessairement bb.

Robe fauve : le fauve est du à l’allèle e, allèle récessif : le chien fauve est donc ee, et cela inhibe les autres gènes (A et B). Le locus C explique les différences de couleurs des cockers " golden " : de fauve foncé à sable.

Les marques feu des noir/chocolat et feu sont dues à l’allèle a t qui est récessif (ces chiens sont alors at at).

  • Les pluricolores

Les couleurs de base sont dues aux trois mêmes gènes que chez l’unicolore.

A ces gènes s’ajoute l’action des gènes S et T (ou R) qui règlent les dimensions du blanc et la présence ou l’absence de mouchetures.

La présence du blanc est due au locus S (combinaisons de s i, s p et s w entraînant des panachures plus ou moins envahissantes).

Les robes mouchetées (par ex. bleu rouan) sont dues au locus T (ou au locus R) : les chiens TT (ou RR) sont plus intensément mouchetés que les chiens Tt+ (ou Rr+).

Les chiens t+t+ (ou r+r+) sont particolores.

Des exemples pour mieux comprendre : déterminons le génotype de robe d’un cocker !

II est possible de déterminer le génotype de robes des cockers. Il est alors possible de prévoir les couleurs que pourraient avoir les chiots lors d’une saillie.

Pour cela, il faut posséder le maximum d’informations sur la généalogie du chien dont on veut connaître le génotype : couleur des ascendants, couleur de leurs autres descendants, couleur des descendants, couleur des frères et sœurs …

Il est important que le père supposé soit le père réel !!!

On se base sur deux principes et on procède série allélique par série allélique.

  • On se base tout d’abord sur une évidence : les chiots ont nécessairement leurs allèles issus de ceux de leurs parents!

  • Si les petits présentent des caractères récessifs, leurs deux parents sont nécessairement porteurs d’au moins un allèle correspondant chacun.

Exemple 1 :
Prenons le cas d’un mâle noir. Imaginons que son propriétaire souhaite savoir s’il est porteur de l’allèle " chocolat " soit b. (on considèrera uniquement ce gène)

Le plus simple est de le croiser (si nécessaire, à plusieurs reprises) avec une femelle chocolat.

Si des chiots chocolat apparaissent dans cette portée, le chien est donc B+b.

Il est aussi possible de le croiser avec une femelle noire mais porteuse de b, mais la probabilité de naissance de chiots homozygotes récessifs est diminuée :

Calculs théoriques :

Dans le cas du premier croisement, si le père est porteur chocolat, il fabrique des spermatozoïdes porteurs de l’allèle " noir " : B+ dans 50 % des cas et porteurs de l’allèle marron : b dans 50% des autres cas. La mère possède uniquement l’allèle marron : 100% de ses ovules seront donc porteurs de cet allèle : b. On aura donc en théorie 50% des chiots noirs hétérozygote B+b et 50% de chiots marron bb. (En pratique, ces proportions ne sont pas forcément respectées !)

Dans le deuxième croisement, on croise deux individus hétérozygotes : B+b : chacun produit donc 50% de gamètes porteurs chocolat et 50% porteurs noir. On a alors 50%x50%= 25% de chiots marrons ainsi que de chiots noirs B+B+ et 50% de chiots noirs B+b : au final on a 75% de chiots noirs et 25% de marrons.

Voici un échiquier de croisement qui aide à comprendre ce résultat : on y voit les possibilités d’union des gamètes et les chiots issus de ces unions :

Gamètes Mère Père

B+

b

B+

B+B+

Chiot noir

B+b

Chiot noir

b

B+b

Chiot noir

bb

Chiot chocolat

On a donc bien 3 fois plus de chiots noirs que de chiots chocolat.

On peut raisonner ainsi pour tous les gènes !

Le croisement avec l’homozygote récessif pour un gène donné permet donc de savoir si le chien analysé est hétérozygote pour le même gène !

Exemple 2 :
Imaginons qu’une femelle de phénotype noir soit saillie par un mâle lui aussi noir et qu’elle mette au monde des chiots de toutes les couleurs possibles pour les unicolores : fauve, noir, chocolat, noir et feu, chocolat et feu.

Cela peut paraître étonnant, mais c’est possible même si la probabilité d’une telle portée est faible.

Dressons le génotype des parents.

  • Gène B : Les deux parents sont noirs, c’est le phénotype dominant : ils sont donc (B+) mais ont des chiots chocolat (bb) : chaque parent est donc B+b.

  • Gène A : Ils sont unis mais ont des chiots " tan " (at at) : chaque parent est donc As at.

  • Gène E : Ils ont eu des chiots fauves : ee. Ils sont donc E+e.

Le fait que les parents soient hétérozygotes pour trois gènes permet à leurs chiots d’avoir des génotypes et phénotypes très divers !

Voila, j’espère que c’est à peu près clair et que vous n’êtes pas mort d’ennui.

Si j’ai commis des erreurs ou si vous avez des questions, n’hésitez pas à venir poser vos questions sur le forum Cliquez ici où vous pourrez me contacter par MP ou par mail à cette adresse : upsi7@yahoo.fr

Laurie
 



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